19.8.15

Bissau: No olho do furacão

La Guinée-Bissau est malade. Rassurez-vous ! Elle n’est pas malade d’Ebola, comme en ont souffert la Guinée Conakry, le Liberia et la Sierra Léone. Il s’agit plutôt d’une crise politique au sommet de l’Etat, qui a plongé le pays tout entier dans une apoplexie sans précédent. En effet, cela fait près de deux mois que le torchon brûle entre le président José Mario Vaz et son Premier ministre, Domingo Simoes Pereira ; deux hommes pourtant issus d’un même parti, le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap vert (PAIGC). La rupture de confiance entre les deux hommes est née d’un certain nombre de dérives, notamment la corruption, les détournements de deniers publics, le népotisme, etc. Si fait que malgré l’appel au dialogue lancé par les représentants de la communauté internationale réunis à Bissau, la semaine dernière, le mercure n’est pas retombé. La preuve, le président Vaz a mis sa menace à exécution, en dissolvant le gouvernement. Toute chose qui a exacerbé la tension puisqu’en réaction, des partis politiques et des organisations de la société civile ont battu le pavé, le 17 août 2015, pour exiger que le Premier ministre soit reconduit à son poste. Quand la rue s’en mêle, la situation ne peut que se complexifier davantage. Et ce n’est pas tout. Le parlement, constatant que le poste de Premier ministre revient constitutionnellement au chef du parti majoritaire, conteste le limogeage du sieur Pereira ; compliquant du coup la tâche au chef de l’Etat, Vaz, qui ne sait plus à quel saint se vouer. Déjà coutumière des coups d’Etat sanglants au point d’en avoir fait un label, la Guinée- Bissau, à travers cette crise au sommet, présente une nouvelle spécificité. Car, voilà un pays sous régime présidentialiste où le chef de l’Etat ne peut pas mettre fin aux fonctions de son Premier ministre. Pourtant, excepté les régimes parlementaires, les Premiers ministres sont le plus souvent considérés comme des fusibles qui sautent dès que, pour une raison ou pour une autre, la tension sociale commence à monter. Ce qui n’est pas le cas en Guinée Bissau où le parti majoritaire lui-même fait de l’obstruction au chef de l’Etat. C’est à n’y rien comprendre. La CEDEAO doit veiller au grain Car, s’il est vrai que les textes en vigueur ont pour objectif de réduire la toute-puissance du chef de l’Etat bissau-guinéen, il faut cependant déplorer que ces mêmes dispositions constitutionnelles, dans leur esprit, accordent implicitement les pleins pouvoirs au Premier ministre qui s’en trouve là gonflé à bloc, du fait du soutien de son parti. En tout cas, pour l’heure, la seule solution qui s’offre au président Vaz est la dissolution de l’Assemblée nationale, avec l’organisation d’élections anticipées. Ce qui, malheureusement, pourrait jouer non seulement sur la mise en œuvre de son programme politique, mais coûterait aussi énormément au contribuable bissau-guinéen. A moins que par orgueil ou par patriotisme, le Premier ministre Domingos Simoes Pereira décide de rendre le tablier pour sortir son pays de ce blocage institutionnel qui n’a que trop duré. Cela aurait été plus sage et plus élégant pour l’image même de la Guinée Bissau, ce narco-Etat à l’histoire sociopolitique très mouvementée. Du reste, il faut craindre que par leur incurie, les dirigeants bissau-guinéens ne finissent par donner l’occasion à l’armée d’intervenir à nouveau dans l’arène politique. C’est pourquoi la Communauté d’économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui soutient à bout de bras la Guinée Bissau, doit veiller au grain pour qu’une solution soit trouvée le plus rapidement possible entre le chef de l’Etat et son Premier ministre. A défaut, la tempête actuelle risque de se transformer en un ouragan aux rafales ravageuses. Boundi OUOBA Le Pays, Burkina Faso

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