25.2.16

Argélia teme bombardeamentos à Líbia

Des responsables algériens s’attendent à des frappes militaires étrangères incessantes en Libye. Tout comme ils s’attendent à un drame humanitaire aux frontières du pays. Pour eux, une telle intervention aura de graves conséquences aussi bien économiques que sur le volet sécuritaire tout le long des régions frontalières vers lesquelles un afflux massif de réfugiés libyens serait attendu. Les autorités, disent-ils, sont en train de se préparer à ce scénario chaotique, contre lequel l’Algérie et les autres voisins de la Libye n’ont cessé de mettre en garde. Alors que tous les experts expriment leurs craintes quant aux conséquences d’une intervention militaire en Libye, des sources diplomatiques confirment l’imminence de frappes aériennes, conduites par les Etats-Unis, et auxquelles prendraient part la France, l’Italie et la Grande-Bretagne. En Algérie, les responsables, avec lesquels nous nous sommes entretenus, sont tous «inquiets», parce que «convaincus» d’une intervention étrangère en Libye, pays avec lequel l’Algérie partage plus de 900 km de frontière. Déjà que la situation est «extrêmement difficile», affirment nos interlocuteurs, avec la multiplication des acteurs politico-militaires qui s’affrontent pour le contrôle d’un terrain, déjà partagé entre les terroristes de Daech, au Nord notamment où se trouve le croissant utile, et entre un Sud ouvert sur le Sahel, l’Afrique centrale et de l’Ouest, devenu un terreau pour la criminalité organisée où des bandes armées s’adonnent librement aux trafics en tout genre comme ceux de la drogue dure, du kif, des armes et des pièces d’art, avec la complicité d’une communauté touareg, désabusée et longtemps abandonnée à son isolement. A cette situation est venue se greffer Daech, ce groupe terroriste pourchassé en Irak et en Syrie par une coalition occidentale de plus de 20 pays, qui a réussi avec ses 5000 hommes, puissamment armés à contrôler la région la plus riche de la Libye, devenue un casse-tête pour ses voisins mais dont les partenaires ne voient comme solution que la voie militaire, qui selon eux, «est à même d’empêcher l’expansion de Daech et de venir à bout de ce groupe terroriste». Mais, aussi bien les pays voisins que les experts rejettent toute intervention étrangère, en raison de son impact dramatique sur tous les plans. «Toutes les expériences ont montré que celle-ci ne ferait qu’aggraver la situation et renforcer les groupes terroristes, dont les actions trouveront une légitimité», expliquent nos interlocuteurs. Pour eux, l’Algérie, tout comme les autres pays, va devoir faire face à une «crise humanitaire terrible». «Des milliers de Libyens vont fuir les zones de bombardements et nous nous retrouverons à accueillir des populations entières au niveau de nos frontières. Des décisions ont été prises au plus haut niveau pour mettre en place la logistique qu’il faut…», révèlent nos sources. Il n’y a pas que le volet humanitaire auquel l’Algérie fera face. «Notre pays, qui vit une crise économique, risque d’accueillir des milliers de réfugiés auxquels il faudra assurer nourriture, soins et hébergement. Cette prise en charge a un coût que l’Algérie va devoir assumer au moment où elle vit une crise économique due à la chute drastique de ses revenus pétroliers. Il faudra s’attendre à des situations critiques au niveau des villes frontalières où la pression sur les denrées alimentaires de base, par exemple, sera lourde à supporter. Il est à craindre aussi des infiltrations de terroristes qui pourront profiter du flux massif de réfugiés. L’armée, qui certes a les moyens de sa politique, ne pourra pas assurer le risque zéro tout au long des 900 km de frontière. Nos troupes vivront, elles aussi, des moments difficiles en raison de la pression qui va s’exercer sur elles et devront être encore plus présentes dans ces régions au détriment d’autres espaces qui ont besoin d’être protégés», notent nos sources. Pour toutes ces raisons, «les plus hautes autorités du pays n’ont cessé d’alerter les pays occidentaux sur les conséquences humanitaires, économiques et sécuritaires d’une quelconque opération militaire étrangère en Libye, en privilégiant la voie du dialogue entre les différents acteurs libyens qui sont les seuls à même de trouver une solution à la crise qui secoue leur pays. La voix de la raison n’a pas été écoutée et l’on s’attend à une escalade qui met l’Algérie en état d’alerte maximum. Les bombardements vont probablement cibler des régions non loin des frontières algériennes. Le risque est imminent», concluent nos interlocuteurs. Ils parlent de nombreuses réunions à un haut niveau autour de la préparation des camps pour réfugiés et la logistique nécessaire. A moins d’un événement majeur, tout porte à croire que le brasier libyen n’est pas près de s’éteindre et risque même d’emporter dans son sillage des pays comme le Mali, le Niger, le Tchad, dont les capacités de riposte sont réduites, ou la Tunisie qui traverse qui crise politico-économique assez difficile. Salima Tlemçani El Watan

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